Pierre Miserez: Le génie des grands
Tribune de Lausanne
Voici un comédien humoriste qui mord la vie. Surprenant personnage qui Pierre Miserez, à découvrir de toute urgence aux Faux-Nez, juste le temps d’une révérence chaplinesque avant qu’il ne s’installe, aux côtés des plus grands – et pour longtemps – dans ces salles parisiennes qui vous font une réputation. C’est que Pierre Miserez a tout simplement du génie, qu’il développe sur scène un jeu sensible et drôle, qu’il sait jouer avec le public comme il joue de sa canne et de son chapeau mou; comme il joue enfin de ce qui fait ou ne fait pas l’actualité, toutes choses bonnes à rire de peut qu’on ne vous entende en grincer des dents.
Son spectacle, son “One man seul”, comme il dit, est une histoire sans suite, sans cesse recommencée, un regard acéré et tendre, quelque part, sur les gens qui nous entourent. Pas un que vous n’ayez un jour rencontré; pas un qui ne vous ait fiché au coeur un gros chagrin, une grosse blague ou une petite danse loufoque et désordonnée. Citer ici quelques-unes de ses histoires est une démarche sans rime ni raison: on ne vend pas l’humour au mètre (tant pis pour les relieurs), et affirmer que Miserez est Beuchat (l’un de ses personnages) témoignerait d’une bien courte vue. Or, Pierre Miserez a le don de l’ubiquité poétique; c’est ce qui explique qu’avec des mots, un visage, un corps et un portemanteau il peut être présent, partout. Il vous reste, la fantaisie et le rire garantis, à être aussi nombreux que le public accouru vendredi soir… à le rattraper.
Partrick Ferla